- Author, Anastasia Lotareva
- Role, BBC Russie
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21 juillet 2023
Trois semaines après l’éphémère mutinerie du groupe Wagner, il y a encore plus de questions que de réponses sur ce qui s’est exactement passé les 23 et 24 juin, et sur ce que l’avenir réserve aux mercenaires et à leur chef Evgueni Prigojine.
Les combattants de Wagner parlent rarement aux médias, mais BBC Russian a réussi à contacté un jeune commandant qui a accepté de partager, dans l’anonymat, son expérience avec nous.
Lorsque Evgueni Prigojine a fait entrer ses troupes dans la ville de Rostov, dans le sud de la Russie, en juin, Gleb – nom d’emprunt – s’est retrouvé au beau milieu de l’action.
Gleb est un jeune commandant qui avait déjà participé aux assauts sur la ville symbolique de Bakhmut, dans l’est de l’Ukraine.
Il se reposait avec son unité dans une caserne de la région occupée de Luhansk, lorsqu’ils ont reçu l’appel à rejoindre une colonne de combattants Wagner quittant l’Ukraine.
L’appel, tôt le matin du 23 juin, a été lancé par un commandant de Wagner que Gleb ne souhaite pas nommer pour des raisons de sécurité, mais qui agissait sur ordre de Prigozhin et du conseil de commandement de Wagner.
« C’est un déploiement complet », lui a-t-on dit. « Nous formons une colonne, allons-y ».
Gleb raconte que personne n’a été informé de la destination de la colonne, mais qu’il a été surpris de constater qu’elle s’éloignait de la ligne de front.
Les combattants de Wagner n’ont rencontré aucune résistance, dit-il, lorsqu’ils ont franchi la frontière russe dans la région de Rostov.
« Je n’ai vu aucun garde-frontière », se souvient-il. « Mais la police de la route nous a salué tout au long de la route.
Des canaux Telegram étroitement liés au groupe Wagner ont ensuite affirmé que les gardes-frontières du poste de contrôle de « Bugayevka » avaient déposé leurs armes à l’arrivée des combattants de Wagner.
Ces canaux ont partagé une photo qui aurait été prise sur les lieux, montrant plus d’une vingtaines d’individus non armés en tenue de camouflage.
À l’approche de Rostov-sur-le-Don, les combattants ont reçu l’ordre d’encercler tous les bâtiments des forces de l’ordre de la ville et d’occuper l’aéroport militaire. L’unité de Gleb a reçu l’ordre de prendre le contrôle du bâtiment du bureau régional du FSB (le service secret russe) dans l’Oblast, région de Rostov.
Lorsqu’ils se sont approchés du bâtiment, celui-ci semblait complètement fermé et vide. Ils ont fait voler un drone au-dessus du bâtiment pour vérifier qu’il n’y avait aucun signe de vie et, au bout d’une demi-heure, une porte s’est ouverte et deux personnes sont sorties dans la rue.
Ils ont dit : « Les gars, on va faire un marché », raconte Gleb. J’ai répondu : « Qu’est-ce qu’il y a à faire ? C’est notre ville ».
« Nous nous sommes donc mis d’accord de ne pas nous en prendre les uns aux autres. Ils sortaient fumer de temps en temps ».
Les journalistes de Rostov ont fait état d’une situation similaire pour de nombreux bâtiments gouvernementaux de la ville et de ses environs. Les combattants de Wagner commençaient par les survoler à l’aide de drones, puis les encerclaient. Personne n’était autorisé à sortir, mais les coursiers étaient autorisés à entrer avec de la nourriture.
Aucune explication
Pendant ce temps, le chef de Wagner, Evgueni Prigojine, se trouvait au quartier général du district militaire sud de l’armée russe et rencontrait le vice-ministre russe de la défense, le général de corps d’armée Yunus-bek Yevkurov, et le chef adjoint de l’état-major général, le général de corps d’armée Vladimir Alexeyev.
Prigojine a exigé qu’ils lui livrent le chef d’état-major général, Valery Gerasimov, et le ministre de la défense, Sergei Shoigu.
Au moment où Prigojine était en réunion, une autre colonne de combattants de Wagner était en mouvement.
Gleb confirme les rapports des médias selon lesquels cette colonne était dirigée par le fondateur de Wagner, Dmitry Utkin, un ancien officier des forces spéciales que l’on voit rarement en public.
Cette colonne se trouvait sur l’autoroute principale en direction de Voronezh et, apparemment, de Moscou, précise Gleb.
A la question de savoir quel était le plan à ce moment-là, ce que Prigozhin avait l’intention de faire ou prévoyait de faire, Gleb nous répond : « Nous n’en avions pas la moindre idée ».
« Nous avons appris ce qui se passait par Telegram, tout comme vous », ajoute-t-il.
Au fil de la journée, des images de ce qui se passait à Rostov ont été diffusées dans le monde entier. Les gens ont été surpris de voir des habitants et même des journalistes locaux sourire et discuter avec certains des combattants de Wagner qui occupent leur ville, alors qu’ils sont habituellement très discrets.
« C’était les anciens détenus », explique Gleb, en référence aux nombreux prisonniers ou condamnés en service qui ont été enrôlés dans le groupe Wagner l’année dernière. « Personne ne leur a dit de ne pas le faire, personne ne se soucie d’eux ».
Pour les combattants chevronnés comme Gleb, qui ont été engagés bien avant la guerre en Ukraine, les règles sont beaucoup mieux comprises.
Gleb a expliqué à la BBC que quelques temps auparavant, le haut commandement leur avait dit que quiconque parlerait aux médias serait « neutralisé », c’est-à-dire tué. Plusieurs anciens combattants de Wagner nous ont dit la même chose.
Dans la soirée du 24 juin, l’un des supérieurs de Gleb le contacte et lui dit, sans aucune explication, que son unité et lui doivent retourner à la base de Luhansk.
Alors qu’ils rentraient à la caserne, ils suivaient les nouvelles sur Telegram.
C’est en cemoment qu’ils se rendent compte que des poursuites pénales avaient été engagées contre Prigozhin, puis abandonnées, et qu’il devaient s’exiler en Biélorussie.
Ils lisent également que les combattants Wаgner ne seraient pas tenus responsables de leur rôle dans la mutinerie en raison de leurs « mérites au combat », évoqué par l’attaché de presse du président Poutine, Dmitri Peskov.
Pour Gleb et son unité, l’avenir est désormais incertain. Ils ont reçu l’ordre de rester dans leur caserne à Louhansk et d’attendre d’autres ordres.
Leurs hôtes, les autorités de la République populaire de Louhansk, militants séparatistes pro-russes de l’est de l’Ukraine, souhaitent en savoir plus sur leurs projets futurs et sur ce qu’il adviendra de leur équipement et de leurs munitions.
Nous avons demandé à Gleb pourquoi il ne partait pas tout simplement : « Mon contrat n’a pas encore expiré », répond-il.
Prochain arrêt : la Biélorussie ?
Depuis la fin de la mutinerie de Wagner, l’histoire a connu de nombreux rebondissements inattendus.
Il a été revélé récemment que, cinq jours seulement après le soulèvement, le président Poutine a rencontré Prigojine et 35 hauts gradés de Wagner au Kremlin.
On ne sait pas exactement qui étaient ces 35 commandants.
Deux commandants de Wagner, connus sous les noms de « Zombie » et « Lotus », sont souvent cités par les journalistes russes favorables à la guerre.
Dans des décklarations sur des canaux Telegram proches du groupe Wagner, ces deux commandants ont fait partagé leurs réflexions sur la suite des événements.
« Nous avons tous été envoyés en vacances jusqu’au début du mois d’août », a déclaré Lotus, de son vrai nom Anton Yelizarov.
« Personnellement, cela fait cinq ans que je n’ai pas été au bord de la mer avec ma famille, et d’autres gars sont également plongés dans des affaires familiales maintenant », a-t-il déclaré sur Telegram.
« La décision prise par le conseil des commandants est de donner à chacun la possibilité de se reposer avant le grand travail qui nous attend.
Lotus indique que ce « gros travail » implique la rotation des combattants de Wagner basés dans ce qu’il a appelé des « endroits éloignés ». Il faisait vraisemblablement référence à des endroits comme la République centrafricaine, d’où 600 mercenaires russes auraient récemment été renvoyés chez eux.
Cette décision fait suite à de nombreuses plaintes émanant de familles de combattants Wagner, qui affirment que leurs proches sont bloqués dans des pays africains depuis plus d’un an, alors qu’ils n’ont signé que des contrats de six mois.
Anton Yelizarov a également parlé de la Biélorussie et des projets de transfert de certains combattants Wagner dans ce pays.
« La deuxième chose, et la plus difficile, est d’entrer en Biélorussie », a-t-il déclaré. « Nous devons préparer des bases, des terrains d’entraînement, nous coordonner avec les administrations et les organismes autonomes locaux, organiser la coopération avec les forces de sécurité biélorusses et mettre en place une logistique.
Un deuxième commandant, « Zombie », s’est également exprimé sur Telegram au sujet de l’avenir de Wagner.
« Nous ne sommes pas seulement unis par un contrat, mais aussi par une idée commune, celle de nous battre », a-t-il déclaré. « Nous ne voulons pas seulement purger notre peine, mais être utiles à la patrie », a poursuivi Zombie.
L’animateur et propagandiste de la télévision russe Vladimir Solovyev a identifié « Zombie » comme un ancien combattant des forces spéciales appelé Boris.
« Beaucoup nous considèrent comme des mercenaires, mais ce n’est pas vrai. Nous avons plus de patriotisme que les autres », a déclaré Zombie. « Nous nous battons sans ménager nos vies. Et le chef nous unit, tout comme la mission commune », explique-t-il.
On a demandé à « Zombie » si lui et ses camarades envisageraient de rejoindre l’armée régulière, comme l’a suggéré le président Poutine.
« Je serai soit avec mes combattants dans la société militaire privée Wagner, soit en train de me détendre à la maison devant la télévision », a-t-il répondu. « Et c’est ce que tout le monde pense.
La BBC a posé la même question à Gleb, qui se trouve maintenant à Louhansk avec son unité. Il affirme ne pas connaître une seule personne ayant signé un contrat avec le ministère de la défense jusqu’à présent.
Cet article a été prélevé d’internet par la rédaction de acvg-chalons.fr pour la bonne raison que ce dernier figurait dans les colonnes d’un blog dédié au thème « Ancien Combattants de Chalons-en-Champagne ». Cette chronique a été générée de la manière la plus complète que possible. Pour émettre des observations sur ce dossier autour du sujet « Ancien Combattants de Chalons-en-Champagne », merci de contacter les contacts indiqués sur notre site web. acvg-chalons.fr est une plateforme numérique qui compile de nombreux posts publiés sur le web dont la thématique principale est « Ancien Combattants de Chalons-en-Champagne ». En visitant de manière régulière nos pages de blog vous serez informé des futures annonces.