C’est un document historique inouï. En 1978, les Éditions Plon avaient eu l’excellente intuition de publier le journal tenu par Joseph Simon entre 1945 à 1951. Six années pendant lesquelles ce fonctionnaire dévoué de l’Administration pénitentiaire a veillé sur le prisonnier le plus illustre de France : le maréchal Pétain.
Joseph Simon était mort dix ans plus tôt, en 1968, mais il avait déjà raconté une partie de ces souvenirs à un journaliste de « L’Aurore » entre les 27 octobre et 10 novembre 1959. Pierre Bourget s’en souvenait et avait demandé à ses ayants droit l’autorisation d’ouvrir le coffre de la Banque de France où avaient ét&é…
C’est un document historique inouï. En 1978, les Éditions Plon avaient eu l’excellente intuition de publier le journal tenu par Joseph Simon entre 1945 à 1951. Six années pendant lesquelles ce fonctionnaire dévoué de l’Administration pénitentiaire a veillé sur le prisonnier le plus illustre de France : le maréchal Pétain.
Joseph Simon était mort dix ans plus tôt, en 1968, mais il avait déjà raconté une partie de ces souvenirs à un journaliste de « L’Aurore » entre les 27 octobre et 10 novembre 1959. Pierre Bourget s’en souvenait et avait demandé à ses ayants droit l’autorisation d’ouvrir le coffre de la Banque de France où avaient été déposées les notes du geôlier et de son prisonnier. Il s’agissait alors de transformer cette série d’articles en livre, ainsi que le fonctionnaire l’avait prévu avant sa disparition.
« Les carnets et cahiers où Joseph Simon avait brossé cet étonnant tableau, j’en connaissais dès longtemps l’existence et l’intérêt », écrit Pierre Bourget dans la préface du livre « Pétain, mon prisonnier » qui a pris le même titre que la série d’articles publiés dans « L’Aurore ». « Je savais aussi que Joseph Simon avait conservé par-devers lui la plupart des pièces relatives à l’emprisonnement de Philippe Pétain, parmi lesquelles le manuscrit des notes écrites en prison par l’ancien chef de l’État et la correspondance échangée avec l’administration pénitentiaire à propos de cette captivité. » Tout au long de l’ouvrage, les notes de Simon composent le journal et les écrits de Pétain alimentent les précisions du journaliste.
« On m’a jeté des cailloux »
Le récit démarre en réalité dès la préface, quand Joseph Simon accueille le Maréchal Pétain à Montrouge. Le militaire arrive de Suisse où il avait fui au terme de huit mois passés sous l’étroite surveillance allemande au château de Sigmaringen. « Le 27 avril 1945, le capitaine Joseph Simon en civil réceptionne dans la cour du fort de Montrouge le maréchal Pétain et sa femme », raconte Pierre Bourget. L’ancien chef de l’État français séjourne dans cette forteresse au sud de Paris avant son procès devant la Haute cour de justice. « Il avait l’air apeuré, a raconté le geôlier au journaliste. Il parlait peu, il m’a dit seulement : ‘’On m’a jeté des cailloux alors que j’étais dans le train.’’»
Par quel hasard de l’histoire Joseph Simon est devenu le surveillant de Pétain ? Né en 1894 à Plouvorn, dans le Finistère, cet aîné des huit enfants d’un métayer, est instituteur avant d’intégrer l’armée en 1915. Blessé au bras le 1er juin 1918, il termine le premier conflit mondial avec deux citations. Nommé adjudant, il fait ensuite carrière dans l’armée en voguant de Rennes à Mourmelon en passant par Coëtquidan et Châlons. En 1929, il quitte l’armée et se tourne vers l’un de ces emplois « réservés » aux Anciens combattants de 1914-18. Il intègre la pénitentiaire.
Soldat de 14 puis Résistant
Parallèlement, Joseph Simon poursuit une carrière de réserviste. Il est nommé lieutenant en 1835. Interrogé par Pierre Bourget, son fils dépeint un nationaliste intransigeant « qui penchait vers les Croix-de-Feu », une association politique qui a plus tard basculé vers le fascisme. Joseph Simon est rappelé sous les drapeaux quand éclate la Seconde guerre mondiale, en août 1939. Démobilisé après la défaite de 1940, il retrouve ses fonctions à la centrale de Clairvaux, près de Troyes, où il a accompli l’essentiel de sa carrière. Il entre dans la Résistance dans ce département de l’Aube où il participe à de nombreux parachutages et à la création de plusieurs groupes paramilitaires.
« Peut-on imaginer l’état d’âme du résistant Joseph Simon quand il voit apparaître à sa descente de voiture Philippe Pétain ? »
À la Libération, Joseph Simon est rappelé par l’Armée. Il est affecté au bureau de la Justice militaire du gouvernement militaire de Paris où il assure la liaison avec l’Administration pénitentiaire. Il doit notamment décider des locaux qui accueilleront les personnalités politiques du gouvernement de Vichy. Promu capitaine en avril 1945, il est affecté à la direction du Fort de Montrouge où il accueille donc le maréchal Pétain ce 27 avril 1945.
« Peut-on imaginer l’état d’âme du résistant Joseph Simon quand il voit apparaître à sa descente de voiture ce Philippe Pétain qui est tout à la fois le général de Verdun sous les ordres de qui il a jadis combattu et le maréchal de Montoire et de la collaboration avec les Allemands, contre lequel il s’est révolté ? » s’interroge l’auteur de la préface sans avancer de réponse.
La cohabitation au Fort de Montrouge dure deux mois, jusqu’au transfert du prisonnier Pétain au Palais de Justice de Paris le 23 juillet 1945.
Quatre ans et demi de cohabitation
Joseph Simon et ses gardiens encadrent Pétain et « la maréchale », Eugénie Pétain, la femme du militaire, pendant toute la durée de son procès, soit jusqu’au 15 août 1945. Il accompagne ensuite le prisonnier au Fort du Portalet. L’endroit a été choisi comme lieu de détention du prisonnier à l’issue de l’audience et alors que sa condamnation à mort a été commuée en peine de prison à perpétuité par le général de Gaulle.
Eugénie Pétain ne suit pas son mari en vallée d’Aspe, elle demeure dans son appartement parisien et effectuera plusieurs allers-retours vers Urdos. Des séjours où son caractère et ses remarques agaceront passablement le geôlier Simon ainsi qu’il le confiera régulièrement dans son journal.
Pétain ne demeure que quatre mois en Aspe. Il quitte le Fort du Portalet pour celui de Pierre-Levée sur l’île d’Yeu, au large de la Vendée, le 14 novembre 1945. Joseph Simon est alors nommé directeur du lieu. Il y reste jusqu’en juillet 1949 où il se voit confier d’autres missions à Paris. Il reviendra néanmoins quelques mois entre juillet et octobre 1950 afin de permettre à son successeur à Pierre-Levée de prendre son congé réglementaire. Au total, Joseph Simon aura passé quatre ans et demi auprès du maréchal dégradé.
« Durant ces années, écrit-il dans son journal, j’ai partagé la captivité du condamné dont, peu à peu, j’étais devenu, si j’ose dire le prisonnier… Ces quatre ans et demi m’ont obligé à vivre dans son intimité la plus complète, à son contact quotidien dans une enceinte fortifiée où personne ne pouvait entrer sans mon autorisation. » Le fonctionnaire aura tenu une mission délicate : veiller à la bonne tenue de l’incarcération, sans qu’aucune vague ne vienne alerter l’opinion publique ni rappeler trop souvent au bon souvenir du Maréchal.
Cet article a été prélevé d’internet par la rédaction de acvg-chalons.fr pour la bonne raison que ce dernier figurait dans les colonnes d’un blog dédié au thème « Ancien Combattants de Chalons-en-Champagne ». Cette chronique a été générée de la manière la plus complète que possible. Pour émettre des observations sur ce dossier autour du sujet « Ancien Combattants de Chalons-en-Champagne », merci de contacter les contacts indiqués sur notre site web. acvg-chalons.fr est une plateforme numérique qui compile de nombreux posts publiés sur le web dont la thématique principale est « Ancien Combattants de Chalons-en-Champagne ». En visitant de manière régulière nos pages de blog vous serez informé des futures annonces.